Un chat se réveille dans un univers envahi par l’eau où toute vie humaine semble avoir disparu. Il trouve refuge sur un bateau avec un groupe d’autres animaux. Mais s’entendre avec eux s’avère un défi encore plus grand que de surmonter sa peur de l’eau ! Tous devront désormais apprendre à surmonter leurs différences et à s’adapter au nouveau monde qui s’impose à eux.
FLOW, le chat qui n ‘avait plus peur de l’eau de Gints Zilbalodis. Lettonie/Belgique/France, 2024, 1h15. Film d’animation tout public. Festival de Cannes 2024, sélection Un Certain Regard. Festival du film d’animation d’Annecy 2024, compétition officielle, prix du jury et prix du public.
Critique de Diane Falque, SIGNIS France
Déjà dans le premier long métrage du réalisateur, il était question de nature et d’animaux. Ici, la nature est sublimée, presque comme un personnage à part entière. La beauté des dessins, des décors, de la lumière nous enchante littéralement. Véritable odyssée bouleversante !
Que deviendrait la terre s’il n’y avait plus d’humains ? C’est le propos de Gints Zilbalodis dans son film. De l’homme ne reste que des traces : sculptures, constructions. Certains disent que le chat serait la dernière espèce à rester sur terre si l’homme disparaissait.
Notre héro est un chat gris grand et maigre qui au premier abord nous parait plutôt craintif et qui a peur de l’eau. Inévitablement, il croise d’autres espèces : un chien Golden Retriever, un rongeur capybara, un primate lémurien, un grand oiseau blanc. Leur cohabitation n’est pas naturelle et va s’imposer malgré eux.
Le film est d’abord un film d’aventure, et nous la vivons au fur et à mesure qu’elle s’écrit. Dans cette aventure qui est une course poursuite pour survivre après l’arrivée de la vague géante, où les seuls survivants ne peuvent compter que sur eux-mêmes, Gints Zilbalodis a souhaité nous parler de la solitude, de l’entraide, de la migration. Nos héros affrontent le danger toujours plus grand, et tour à tour, saisis par l’effroi, ils apprennent à compter sur d’autres. Nous les voyons qui évoluent au fil du film, qui s’ouvrent à la différence, accordent leur confiance, proposent l’entraide. A la dérive, leur embarcation les emmène vers des territoires inconnus.
Nous voici plongés dans le monde du vivant. Ce film est conçu comme un documentaire poétique. La planète va mal et la vague qui arrive nous fait penser au Tsunami. Nous sommes saisis littéralement par cette embarcation qui flotte dans la tempête. Lorsque Flow a l’occasion d’explorer les rivages et d’entrer dans les profondeurs des sous-bois, les longs plans séquence prennent le temps de filmer le végétal , et nous font sentir le vent ou la terre qui tremble. Le propos est universel, les décors nous évoquent tantôt les mégalopoles et leurs gratte-ciel, tantôt l’ancienne Europe avec Venise. Le rythme également nous bouscule : les rapides qui emmènent l’embarcation ne nous laissent plus le temps de souffler. Et nous disent surtout qu’il est plus qu’urgent de prendre soin de notre planète. Le thème de l’eau est métaphorique, elle nous dit leur peur : le débit du fleuve est très violent au début du film et se calme au fur et à mesure que les animaux apprennent à se connaître.
Nous pouvons saluer aussi la finesse du dessin qui combine des environnements 3D et un style abstrait et pictural et qui donne ainsi un coup de crayon poétique, suggestif et parfois drôle. Le regard de Flow est affuté et bon, particulièrement touchant. Il n’y a aucune parole et avec beaucoup de subtilité, nous saisissons chacune de leurs intentions. Car Gint Zilbalodis en profite pour utiliser les autres outils du cinéma et aller plus en profondeur, explorer davantage avec la caméra, avec le montage, avec la musique. Pour la musique justement, il l’a choisie simple et répétitive. Il a voulu que »la musique aille très profondément dans le film puis s’élève petit à petit comme un grand crescendo, qu’elle développe doucement une émotion, jusqu’à ce qu’on la ressente en nous. »
Les couleurs et les jeux de lumière dans le décor nous emmène dans un univers gigantesque tantôt végétal, foisonnant, humide, tantôt au cœur de vieilles cités antiques ou de mégalopolis. Avec de longues prises de vue, le film est une véritable expérience à vivre. C’est un plongeon au sens propre comme au sens figuré que le réalisateur nous propose. Entre l’arche de Noé et l’Atlantide …
Flow est une co-production entre trois pays, la Lettonie, la France et la Belgique. En Lettonie, la culture des arts visuels se développe. Flow sera le représentant de ce pays aux Oscars 2025 dans la catégorie du meilleur long métrage international. Le film a aussi remporté quatre prix au Festival international du film d’animation d’Annecy, dont le prix du public du meilleur long métrage.
Diane Falque