MédiasLes Chroniques CinémaPRIMADONNA de Marta Savina

PRIMADONNA de Marta Savina

En Sicile dans les années 1960, une jeune femme s’oppose à la coutume traditionnelle qui lui impose d’épouser son agresseur. Tout en subtilité, un bel itinéraire de libération.

PRIMADONNA de Marta Savina. Italie, 2022, 1h40. Avec Claudia Gusmano, Fabrizio Ferracane, Francesco Colella, Manuela Ventura

Critique de Magali Van Reeth, SIGNIS France

La vie était rude pour les femmes, et les paysans pauvres, dans la Sicile du 20° siècle. Lia aime travailler aux champs avec son père alors que sa mère pense qu’elle doit rester à la maison. Parfois, une procession permet à tout le village de se retrouver et on sent Lia attiré par un beau jeune homme, le fils du maire. Bien qu’elle refuse ses avances, il se sent autoriser à venir l’enlever chez elle, pour la posséder de force et l’épouser ensuite, puisque dans les traditions siciliennes, il n’y a plus offense dès lors qu’il y a mariage.

Pour son premier long-métrage, la réalisatrice s’est entourée de toute une équipe de techniciennes pour un travail remarquable, notamment pour la photo signée Francesca Amitrano et les costumes de Francesca Rodi. Ces deux postes importants pour la conception artistique d’un film donnent à la fois l’ambiance des années 1960 dans un village rural et la splendeur de certains paysages de l’Italie du sud, tout en évitant une surenchère esthétique pouvant nuire au sujet du film.

Inspiré d’une histoire réelle, le récit brosse avec finesse l’ambiance d’un village traditionnel d’avant 1968. Ambiance pesante pour les femmes et ceux qui refusent les pratiques mafieuses. Mais les personnages de Marta Savina ne sont jamais caricaturaux. La mère de Lia, la première à lui demander de bien mettre son foulard pour sortir, de faire ses prières et de se comporter comme une  »jeune fille », saura soutenir sa fille lorsque tous se liguent contre elle. Le père est un homme taiseux, il méprise les commérages mais il connaît le vrai danger des puissants.

Lia n’est pas une militante, elle veut juste dire la violence des événements, rétablir la vérité des faits. Elle refuse le mariage qu’on veut lui imposer parce que, tout simplement, elle n’aime pas le jeune homme arrogant, et son entourage, qui l’ont forcée dans cette situation. C’est la force et les pressions qui régissent tout le village, jusqu’au curé prêt à toutes les compromissions contre quelques billets de banque. Les parias de cette communauté, homosexuel discret ou prostituée au service de tous, ont plus de charité chrétienne que lui.

Avec un ton simple et chaleureux, Primadonna rappelle le long combat des femmes européennes pour s’extraire des traditions, parfois mortifères, qui avaient cours jusqu’au 20° siècle dans de nombreuses régions rurales. Un message d’espoir pour toutes les femmes d’aujourd’hui, en quête d’indépendance, de reconnaissance et de justice. Pour avoir le courage de dire non.

Magali Van Reeth

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