Comment exercer le métier d’enseignant face à la profusion de fausses nouvelles et à l’intégrisme de certains groupes ? Ce film courageux dénonce l’escalade de la violence en milieu scolaire.
AMAL, UN ESPRIT LIBRE de Jawal Rhalib. Belgique, 2023, 1h51. Avec Lubna Azabal, Fabrizio Rongione, Catherine Salée, Kenza Benbouchta, Ethelle Gonzalez-Lardued, Johan Heldenberg, Babetida Sadjo, Mehdy Khachachi. Présenté aux Rencontres du Sud Avignon 2024.
Critique de Magali Van Reeth, SIGNIS France
Après plusieurs documentaires, Jawal Rhalib utilise la fiction pour dénoncer les comportements inadmissibles qui surviennent dans les établissements scolaires, partout dans le monde. S’appuyant sur sa propre expérience et le système de la Belgique – pays du réalisateur – il met magistralement en scène le drame de l’intolérance et de la manipulation des jeunes par des groupes d’activistes sans scrupule.
Amal enseigne la littérature à des adolescents. C’est la remarquable comédienne Lubna Azabal qui l’incarne, dans sa détermination, sa douceur et sa colère. Mounia est l’une de ses élèves. La jeune fille est en rupture avec son milieu musulman et découvre peu à peu son homosexualité. Ce qui suscite les sarcasmes et la violence physique d’un groupe d’élèves. Eux suivent avec assiduité les cours du charismatique professeur de religion musulmane, Nabil. Interprété par Fabrizio Rongione, c’est un homme moderne, élégant et mesuré.
Dans ce récit remarquablement élaboré pour être au plus prés de la réalité actuelle, les réseaux sociaux ont évidement une grande importance. Attisant le harcèlement, le passage à l’acte et la diffusion de la violence, à l’intérieur même d’une classe de collège, d’un établissement scolaire. Astucieusement, le réalisateur montre qu’ils peuvent aussi être utilisés pour dénoncer avec justesse des comportements inadmissibles.
La mise en scène maintient subtilement la tension dramatique. Aucune lourdeur pour poser les scènes et les protagonistes, pas d’explication inutile. On avance dans l’accélération des événements, la montée de la violence, avec heureusement quelques moments plus doux pour se poser, reprendre souffle.
Le réalisateur belge, de culture musulmane, tient à dénoncer le radicalisme de certains, surtout lorsqu’ils manipulent les plus jeunes et impriment à tous les musulmans leur vision étroite de la religion. Partout dans le monde, le complotisme et les fausses nouvelles font vaciller le travail des éducateurs. Amal, un esprit libre est un hommage aux enseignants convaincus que la culture, le dialogue et le respect sont les piliers de l’éducation et de la vie en société.
Magali Van Reeth