Le film raconte l’histoire d’un couple de jeunes résistants allemands pendant le nazisme, Hans et Hilde. Une grande complicité intellectuelle et amoureuse va naître entre eux. Ils vont s’engager dans la résistance à la fois par conviction personnelle, et par amour. Mais sans forcément réaliser les implications que cela représente.
BERLIN, ETE 42 d’Andreas Dresen. In Liebe, Eure Hilde. Allemagne, 2h04, 2024. Avec Liv Lisa Fries, Johannes Hegemann, Lisa Wagner, Alexander Scheer.
Critique d’Adrien Fondecave, SIGNIS France
Le titre du film Berlin, été 42 est explicite : on imagine que l’histoire prend place en Allemagne, pendant la Seconde Guerre Mondiale. Mais le titre original, en Allemand, est différent et signifie « Avec amour, ta Hilde ». C’est la fin d’une lettre, adressée par l’héroïne. Ce titre permet de comprendre l’approche du réalisateur Andreas Dresen : traiter l’Histoire en partant de l’intime. En suivant des personnages dans leur quotidien, en scrutant les sentiments qu’ils éprouvent, leurs joies comme leurs peines.

La narration du long métrage se déploie dans deux temporalités différentes, séparées seulement de quelques mois. Une partie de l’intrigue se déroule lors de ce fameux été 1942, joyeux, lumineux, solaire, où Hans et Hilde filent le parfait amour, et commencent à s’engager dans la résistance, par des petites actions anodines en apparence, dont ils ne perçoivent pas vraiment la dangerosité. Ils sont encore jeunes et idéalistes, leurs actions de résistants ne sont pas flamboyantes, et pourtant, bien assez vite, on comprend que le piège nazi va se refermer sur eux.
Le récit alterne avec des séquences où Hilde est emprisonnée par les nazis, où l’on voit son rude quotidien de prisonnière, alors qu’elle attend un enfant de Hans. Des séquences qui mettent en valeur son point de vue de femme, dans une approche discrètement féministe, pour mieux souligner à quel point il est encore plus dur que pour un homme de subir ces mauvais traitements.
Ce long métrage doit beaucoup à ses fabuleux comédiens, notamment Liv Lisa Fries (Hilde) et Johannes Hegemann (Hans), bouleversants et attachants, qui incarnent véritablement leurs personnages et nous entraînent à leur suite dans ces terribles événements. On se réjouit… et on frissonne avec eux… L’autre grande force de Berlin, été 42, c’est de filmer une époque passée avec un regard semi contemporain. Il faut mentionner le rôle absolument essentiel tenu par la cheffe opératrice, Judith Kaufmann, considérée comme la plus grande directrice de la photographie actuelle en Allemagne. Filmé en numérique mais en imitant à la perfection un beau 16 mm désaturé, Berlin, été 42 marque par son aspect visuel, qui reflète totalement le scénario.

Il y a un côté réaliste, frais et spontané dans ce film, qui passe par cette image qu’on dirait tournée à notre époque, avec une caméra portée. De même, le choix des costumes va dans ce sens. Ils peuvent tout aussi bien avoir été portés dans les années 1940 que de nos jours, à quelques détails près. Là encore, c’est voulu par le réalisateur Andreas Dresen et Judith Kaufmann, afin de montrer l’actualité de ce qui se joue dans ce film.
Tiré d’une histoire vraie, Berlin, été 42 a été présenté en avant-première en France, lors du Festival du Cinéma Allemand de Paris, à l’automne 2024. Judith Kaufmann était présente, et a évoqué les intentions du cinéaste Andreas Dresen et comment s’est déroulée la production du film. D’après elle, le réalisateur ne voulait pas montrer des personnes héroïques. Il voulait montrer des gens comme tout le monde, qui ont des préoccupations simples : des relations humaines, des espoirs, des joies, qui se font des misères. Andreas Dresen voulait «montrer des petites choses de résistance pour nous donner du courage». Dans notre monde actuel, c’est exactement ce dont on a besoin.
Adrien Fondecave