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EL PROFESOR / PUAN de Maria Alché et Benjamin Naishtat

Sur fond de tourmente politique en Argentine, un professeur de philosophie, timide et maladroit dans la vie, tente de tenir le cap face à une situation économique et professionnelle désastreuse.

EL PROFESOR / PUAN de Maria Alché et Benjamin Naishtat

Argentine, 2023, 1h50. Avec Marcelo Subiotto, Leonardo Sbaraglia, Julieta Zylberberg, Alejandra Flechner. Festival de San Sebastian 2023.

Critique de Magali Van Reeth, SIGNIS France

Si le récit est centré autour de Marcelo, professeur à l’université Puan de Buenos Aires, tout le second plan montre discrètement combien la vie est devenue difficile en Argentine ces dernières années. Le corps enseignant n’est plus payé, on loue des taudis hors de prix et quand on organise une fête, les invités font la quête pour acheter boissons et petits fours.

A la mort du directeur du département de philosophie, tout le monde pense que Marcelo lui succédera. Mais arrive d’Allemagne Rafael, un collègue aussi charismatique, charmeur et sûr de lui que Marcelo est désordonné et étourdi. Commence alors une période de doutes et de bouleversements, où il faut faire des choix.

Adoptant le ton de la comédie, les réalisateurs argentins Maria Alché et Benjamin Naishtat dressent à la fois un portrait amer et mélancolique de leur pays, et un hommage à l’exercice intellectuel de la philosophie. Une discipline qui pose des questions, soulève des dilemmes qu’on retrouve concrètement dans l’organisation de nos sociétés contemporaines. Et qui sans cesse se heurte à la question de Dieu et de la mort.

Si Marcelo semble souvent perdu dans sa propre vie ou le cours de ses pensées, il est captivant lorsqu’il est en cours. Que ce soit avec les étudiants de l’université, auprès des habitants des quartiers défavorisés ou, pour gagner enfin un peu d’argent, en cours particulier avec une vieille dame extrêmement riche. L’acteur Marcelo Subiotto donne à son personnage une bonhomie sympathique qui s’oppose bien à la flamboyance de Rafael, interprété par Leonardo Sbaraglia.

Avec humour et délicatesse, le film évoque le souvenir de ceux qui ne sont plus là, l’angoisse des personnes âgées au moment où ils sentent la mort rôder autour d’eux. Il montre la soif de savoir de ceux qui n’ont pas pu faire de longues études et comment éveiller un questionnement sur sa propre existence pour enfin se savoir pleinement vivant. La philosophie ne règle pas tout, et comme pour Marcelo, elle ne lui permet pas d’être plus riche. Mais, comme le montre l’une des dernières scènes, en ayant l’impression de reculer, il avance enfin.

Magali Van Reeth

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