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CE N’EST QU’UN AU REVOIR de Guillaume Brac

Guillaume Brac est un habitué des documentaires et nous retrouvons ici son sujet favori : la jeunesse. Nos héros sont des lycéens en classe de terminale, l’année du bac et du choix de l’orientation. Le réalisateur nous offre une véritable exploration de leurs états d’âme en temps réel, où il est question du temps qui passe, des choses qui disparaissent, de la fin de l’adolescence et du passage à l’âge adulte, de la fin du lycée et du passage vers une nouvelle destinée, de leurs doutes et de leurs regrets. En terminale, il est légitime d’avoir peur de se perdre.

CE N’EST QU’UN AU REVOIR de Guillaume Brac. France, 2024, 1h06. Documentaire.

Critique de Diane Falque, SIGNIS France

Guillaume Brac a choisi de tourner dans un pensionnat dans la ville de Die (Drôme) . Avec beaucoup de pudeur, de délicatesse, il filme ces jeunes gens dans tous les temps en dehors du temps scolaire. Alternant les scènes de dortoir, de jeux de matelas, de dominos, de danses improvisées, de sorties en extérieur. Toujours en retrait, allant jusqu’à l’effacement, il filme les rencontres, les gestes affectifs, les moments plus denses, tristes ou tendus. C’est ce respect infini qui permet aux uns ou aux autres de se livrer, de partager leur intimité, avec l’art de transformer les moments du quotidien en quelque chose de miraculeux.  »Parfois, il est plus facile de partager des choses à un étranger » dira Nours au début du film. Car même si les liens d’amitié sont forts entre eux, certains sujets ne sont jamais abordés.

Au fil du film, il nous dresse quatre portraits choisis : ceux de Aurore, Nours, Diane, Jeanne. En voix off, chacune va livrer avec gravité et mélancolie une part de sa vie familiale, affective. Ces voix nous permettent de plonger dans leur imaginaire, elles ne sont adressées à personne en particulier, elles sont prononcées essentiellement pour elles-mêmes. Ainsi, nous restons suspendus à la fois au présent de ce que ces jeunes filles vivent et en même temps à la façon dont elles sont traversées par le passé, les blessures, les peurs. Avec leurs familles meurtries par le deuil, la maladie, la disparition.

Peut-être le vrai sujet du film serait-il alors celui de la famille, celle que l’on a quitté le temps d’une année et celle que l’on se crée ? Car ce qui apparaît surtout à travers le documentaire, c’est la force de leur groupe, leur amitié, cette capacité à rire, à chahuter, à partager les moments de détente autour de la musique ou d’une baignade. C’est à plusieurs également qu’ils vont s’engager et militer autour de l’écologie. Les tableaux sont presque idylliques, dans le cadre magnifique de la Drôme provençale. Comme s’il s’agissait d’un rêve qui déjà ferait partie du passé. D’ailleurs, les élèves de ce pensionnat ne sont pas originaires de la Drôme : ils n’y sont que de passage.

Le finale se joue sur le quai de la gare où le train arrive. Comme le tomber de rideau sur une scène. Fine de partie.  »Ce n’est qu’un au revoir ».

Nous pouvons nous demander pourquoi ce film documentaire nous touche tant ? Certainement parce qu’il nous ramène à notre propre existence, à nos propres expériences d’adolescents, que nous avons traversées à une période de notre vie à la fois maladroite et fragile.

Diane Falque

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