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DUNE 2 de Denis Villeneuve

Après un premier opus en 2021, le réalisateur canadien Denis Villeneuve nous propose la suite des aventures de Paul Atréide, le jeune héros christique en quête de vengeance contre ceux qui ont détruit sa famille et de restauration de la Maison de son père. Quand politique et religion se mêlent, la fabrication d’un mythe se confond avec le pouvoir absolu.

DUNE 2 de Denis Villeneuve. Etats-Unis, 2023, 2h46. Avec Timothée Chalamet, Zendaya, Rebecca Ferguson, Josh Brolin.

Critique d’Anne Le Cor, SIGNIS France

Le deuxième épisode de la saga commence au moment où le premier s’était arrêté. Paul Atréide se rallie à Chani et aux Fremen tout en préparant sa revanche. Une relation amoureuse se noue entre les deux protagonistes. Les sentiments sont exprimés avec retenue mais les nombreux gros plans sur leurs visages marquent l’intimité qui s’installe entre eux.

Il faut savoir pénétrer le monde de Dune et se familiariser avec les appellations des différentes Maisons de ce monde féodal recréé dans un décor futuriste. À la complexité du récit s’ajoute celle des noms des nombreux personnages, difficiles à retenir dans une langue étrange.

Dune 2 se distingue par une galerie de rôles secondaires de toute importance qui sont servis par une pléiade d’acteurs majeurs : Christopher Walken dans le rôle de l’Empereur ; Florence Pugh dans celui de sa fille ; Rebecca Fergusson qui interprète Dame Jessica, la mère de Paul, une femme manipulatrice, membre d’un ordre religieux qui dirige l’Empire dans l’ombre ; ou encore Javier Bardem qui incarne Stilgar, le guerrier Fremen qui voit en Paul Atréide le Messie tant attendu.

Paul est le « chemin » pour les Fremen, peuple des sables qui a su s’adapter et dominer son environnement désertique hostile. En manque d’eau et d’espoir, les Fremen attendent un sauveur et ils reconnaissent en Paul l’Élu tant espéré. Ce dernier tient pourtant plus du prince de Machiavel que du Christ. Lui-même ne croit pas en la prophétie et n’aime pas les fondamentalistes mais il en a besoin dans son ascension vers le pouvoir. Tel Alexandre qui tranche le nœud gordien, Paul impose sa propre loi par la force sans s’embarrasser de fioritures.

Tout comme son personnage, Timothée Chalamet s’impose dans ce rôle de leader charismatique. Si les rêves prémonitoires de Paul lui donnent un côté prophétique, on ne voit pas dans son regard le souffle du mystère de la foi mais on y distincte clairement la flamme de la vengeance du père et l’affirmation du pouvoir dynastique. Après avoir fait ses preuves et relever tous les défis, il devient souverain de droit divin et retrouve son nom et son trône.

Paul perd l’amour de Chani cependant, qui n’accepte pas ce qu’il devient. Elle non plus ne croit pas à la prophétie qui fait de lui le Messie. C’est une guerrière, dignement interprétée par la star américaine Zendaya, dont les grands yeux renvoient toute la détresse de cette histoire qui lui échappe. Paul, en revanche, gagne un nouvel antagoniste en la personne de Feyd-Rautha, un guerrier psychotique et assoiffé de sang. On a un peu de mal à reconnaître le bel Austin Butler dans la peau de ce personnage d’antéchrist de la Maison des Harkonnen, des hommes blancs, imberbes et chauves.

Dans les différentes Maisons qui forment l’Empire, on se tue en famille comme au temps des Mérovingiens. On se marie aussi entre princes et princesses pour nouer des alliances. Le film reprend les périodes marquantes de la civilisation occidentale. On y retrouve les combats de gladiateurs de la Rome antique, les rapports féodaux entre maîtres et vassaux, les défilés militaires dans les stades des nazis, et même l’arsenal nucléaire du monde moderne. Voilà peut-être pourquoi, malgré tous les personnages et les soubresauts du récit, on n’est pas complètement perdu dans ce monde futuriste aux repères familiers.

Le rythme du film va crescendo et suit une véritable accélération jusqu’à l’apothéose finale. Dune 2 est une épopée à grand spectacle, tournée majoritairement dans des décors naturels grandioses. Les effets visuels sont impressionnants et la réalisation bien maîtrisée. Le renversement de situation s’exprime par des rappels dans des scènes fortes telles que les duels entre Feyd-Rautha et les Atréide.

Les thématiques abordées sont profondes comme le danger qu’il y a de mêler pouvoir et foi dans une religiosité où se mélangent les influences des grandes religions du Livre. Il y a l’eau, denrée rare sur la planète Arrakis, que les Fremen recyclent quand ils meurent pour mieux l’utiliser un jour dans le but de fertiliser les sols arides. Une sorte de cycle de la vie en somme, dans ce récit à la forte aspiration écologique.

Fidèle à la première partie, on retrouve dans Dune 2 les mêmes couleurs, le même univers et la musique envoûtante d’Hans Zimmer. Au centre de l’écran émerge la silhouette de prophète de Paul Atréide, au sommet de la colline, face à l’immensité du désert et regardant l’horizon, son long manteau balayé par le vent. Il semble contempler un terrible futur que lui seul peut prédire. Denis Villeneuve, quant à lui, nous invite à une suite annoncée dans une fin ouverte vers de nouvelles péripéties.

Anne Le Cor

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